Invitée à concevoir une exposition par Edouard Prulhière, artiste, professeur à l’ESADHaR dans le cadre du projet « Dé-Faire » qui entend penser différemment, depuis le lieu de l’école d’art, le medium peinture (décentrer ses champs de compétences, interroger son faire, le déplacement de ses gestes, la porosité des disciplines), j’ai choisi de raconter une histoire, partielle et subjective. Une histoire de gestes réactivés ou désactivés, parcellaire et aléatoire, nourrie de mon expérience directe avec les œuvres de peinture. Formée par une approche historique et académique de l’art faisant se succéder les héros de la modernité, la peinture fut longtemps pour moi un terrain banalisé ou sacralisé, relativement éloigné de mes terrains d’investigation théorique et pratique. Je résistais par peur, par pudeur aussi. Je décidais alors de mettre littéralement le pied dans le plat et de partir des œuvres des artistes qui m’avaient jusqu’à maintenant permis de nourrir ma relation à la peinture. Celle-ci est pragmatique, non essentialiste, anachronique et intuitive, non experte.

J’ai souhaité rassembler des œuvres qui, pouvant à tort être lues comme iconoclastes, déplacent les catégories de l’art (usent de tous les médiums sans hiérarchie) et les gestes iconiques et stéréotypés de l’histoire de la peinture moderne par répétition, reprise, retournement, déploiement et hybridation. Des simulacres (ou des leurres).

Les œuvres ici mettent à leur tour le pied dans le plat du voisin ou de la voisine, ici la peinture. Elles passent par une « altérité fondatrice » pour créer l’écart nécessaire, pour déjouer le face-à-face avec soi-même. De cet écart, naît le simulacre, l’humour, la parodie, la singularité, la possibilité d’une nouvelle structure qui se met et qui met au travail.

Stéphanie Airaud


Commissaire d'exposition : Stéphanie Airaud

Artistes : Michel Blaze, Rebecca Digne, Noël Dolla, Nicolas Floch, Léa Le Bricomte, Eva Nielsen, Sylvie Ruaulx, Benjamin Sabatier, Ernest T., Sarah Tritz